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Réal Berthelet - Laitier de père en fils

Dernière mise à jour : 11 janv. 2023


Pendant de très nombreuses années, vous-même, ou vos parents, avez probablement été nombreux à attendre la livraison des produits amenés chaque jour par votre laitier...


Aujourd'hui, nous vous proposons d'en apprendre un peu plus sur les divers aspects de ce métier d'exception qu'a exercé Mr Réal Berthelet, aujourd'hui âgé de 82 ans, et qui a sillonné les rues de Côte-des-Neiges et d'Outremont pendant près de cinquante ans; ainsi que celles de Ville Mont-Royal durant une vingtaine d'années.


C'est vers la fin des années 50, lorsqu'il avait environ 18 ans, que Réal Berthelet commence sa run de lait à domicile, toujours dans Côte-des-Neiges; comme le faisait déjà son père Urgel, du temps où celui-ci transportait les produits de la laiterie Elmhurst et qu'il lui a fait découvrir le métier, alors qu'il l'accompagnait régulièrement dans ses trajets dès l'âge de 6 ans.


Photo laiterie du Québec


À cette époque, il commence tout d'abord à travailler en tant que salarié quelque temps pour un voisin, lui aussi laitier.

Le matin, Réal doit d'abord se rendre à l'écurie, rue de Nancy à 6 heures, pour réceptionner les produits qui lui sont livrés directement sur place par La Ferme Saint-Laurent. Les livraisons commençaient ensuite à partir de 7 heures - parce que c'était la loi - alors qu'aujourd'hui, on peut commencer à l'heure que l'on veut.


Pour effectuer les livraisons, il fallait sonner aux portes, certaines personnes payaient comptant à la semaine, d'autres avec des bons de lait; ceux-ci existaient déjà d'ailleurs du temps de son père.

Le lait qui était préalablement stérilisé par La Ferme Saint-Laurent était vendu dans des bouteilles en verre qui devaient donc être retournées lorsqu'elles étaient vides la fois d'après.


Pendant les deux, trois ans qui ont suivi, ces livraisons se sont faites encore en voiture à cheval. C'est ainsi que jusqu'à ses 20 ans, Réal Berthelet continuera à travailler avec Peggy, la fidèle jument.

Contrairement à son père qui effectuait ses livraisons 7 jours sur 7, pour Réal une semaine de travail était répartie sur 5 jours, soit le lundi, mardi, jeudi, vendredi et samedi.


Pour garder le lait suffisamment frais pendant le transport les jours de grande chaleur en été, il fallait placer les bouteilles dans des seaux remplis de glace, par contre en hiver, il fallait isoler les bouteilles de lait en verre avec du journal pour que ça ne gèle pas :

"On mettait des journaux sur les planchers et une couverte épaisse sur le dessus. Peggy, elle, était protégée avec une couverte de laine placée sur son dos et une toile, l'été, pour la protéger de la pluie" se souvient Réal.

Du temps de son père, il fallait aussi changer les roues pour les remplacer par des patins, mais plus tard Réal n'a jamais estimé vraiment nécessaire de faire de même.


C'était un immense attelage qui circulait d'un bout à l'autre de Côte-des-Neiges, et contrairement à ce que l'on aurait pu penser, les enfants n'attendaient pas l'arrivée de la voiture à cheval avec grand enthousiasme, car en fait, ils en avaient peur ! Imaginez, l'impressionnant véhicule avec son harnachement et toute la marchandise, le tout représentant près de 2000 livres...


RUES BLOQUÉES, CÔTES GLACÉES :


Par un après-midi de novembre 1958, l'hiver venait tout juste de commencer, accompagné d'une grosse neige mouillante qui glaçait : Bien que Réal avait quand même l'habitude de travailler avec Peggy depuis un an déjà, à cause du changement imprévu de la météo ce jour-là, elle n'avait pas encore pu être équipée avec les fers d'hiver, ce qui a provoqué sa chute dans la descente du tunnel Côte-des-Neiges. Notre jeune ami a pour le moins été totalement pris de court face à la situation, car il n'avait aucune expérience pour savoir comment s'y prendre pour aider la pauvre Peggy à se relever. Il eut tout de même la chance que très peu de temps après des personnes qui se rendaient à leur travail à Blue Bonnets soient passés par là et ont donc pu lui venir en aide assez rapidement ! Il faut dire que cela s'est tout de même passé en pleine heure de pointe, car Réal avait fini sa journée et était déjà sur le chemin du retour à ce moment-là. Finalement, cela aura causé plus de peur que de mal et une fois rentrée à l'écurie, Peggy aura pu bénéficier du changement de ses fers et ainsi assurer le retour au travail dès le lendemain matin.


Quelques années plus tard, suite à l'agrandissement de la route jusqu'à Décarie, Réal commencera alors à travailler avec un camion. Il faut dire aussi qu'après toutes ces années, Peggy commençait à être bien fatiguée, mais aussi... notre ami venait d'avoir son permis !

C'est d'ailleurs environ 5 ans plus tard qu'il achètera sa propre route à l'âge de 25 ans.


DU LAIT, DE LA CRÈME, DES ŒUFS ET DU BEURRE. MAIS ENCORE :


Ce sont de nombreuses familles qui attendent chaque jour l'arrivée de leur laitier. Il y a d'ailleurs une réelle confiance qui s'installe au fil du temps au point où plusieurs de ces foyers n'hésitent pas à lui confier les clefs de leur logement pour qu'il puisse ainsi assurer la livraison des produits et en effectuer le rangement dans les frigos !


Toutefois, vers le début des années 60, suite à l'apparition des cruches de lait proposées à un prix plus bas dans les magasins, rajouté à cela que de nombreuses femmes commencèrent aussi à travailler à l'extérieur, il a fallu s'adapter. C'est ainsi que Mr Berthelet a choisi de modifier son emploi du temps en repoussant les livraisons au-delà de 5 heures de l'après-midi alors qu'il terminait sa journée à 4 heures auparavant.


Par la suite, vers 1965, il y eut les premiers camions réfrigérés qui ont commencé à circuler, une vraie nouveauté pour l'époque.


Plusieurs années plus tard, à partir de 1984, Réal Berthelet décidera également de diversifier ses produits en proposant d'autres denrées comme tout d'abord des fromages, puis petit à petit des yogourts, des jus et de la crème glacée. À tout ceci se sont aussi rajoutées les bouteilles d'eau. Même si ça n'était pas tous les laitiers qui en proposaient, la demande était là et cela était d'autant plus apprécié, car c'était tout de même très lourd à ramener du magasin autrement. Il faut savoir aussi qu'il fallait bien rentabiliser l'achat du camion, un camion neuf acheté 45000$ depuis quelque temps déjà et qui avait été une acquisition plus que nécessaire parce que les livraisons n'auraient pu continuer à se faire correctement avec le "tacot" qu'avait été le sien au début.

C'est aussi au cours de ces mêmes années que Mr Berthelet a desservi la garderie qui se trouvait à l'école Notre-Dame-Des-Neiges.


UNE PASSION TOUJOURS INTACTE :


Dès le début, Réal Berthelet savait que le métier était exigeant, mais aussi qu'il permettait de bien gagner sa vie, son père avait tout de même pu élever cinq enfants !


Toutefois, il y avait effectivement certains points négatifs, comme le fait de ne pas avoir pu prendre de vacances pendant près de 45 ans :"c'est que sinon les autres nous volaient des clients; c'était un inconvénient, c'est vrai, mais on n'avait pas de patrons !", me confiera-t-il.


D'ailleurs, quoi qu'il en soit, après plus de 55 ans d'activité et plusieurs années à la retraite, il garde toujours en lui toute la passion de son métier avec tous ses aspects, et tel qu'il le dira lui-même :

"Mais surtout... j'aimais mon travail"


En 1980 MrBerthelet a siégé auprès du conseil d'administration de Ferme Saint-Laurent jusqu'en 1986.

La Ferme Saint-Laurent fut acquise par Laiterie Laval en 1983, jusqu'en 1992, où Laiterie Laval a été rachetée par Quebon.

Ainsi à cette époque, Mr Berthelet qui était toujours à son compte travailla alors avec les produits Quebon. Il continua de travailler jusqu'à sa retraite en 2010.

Aujourd'hui, ce sont ses deux petits-fils et ses deux ex-gendres qui continuent d'exercer le métier, perpétuant ainsi ce que l'on peut définitivement appeler une réelle vocation, tant professionnelle que familiale !


Mes remerciements à Mr Réal Berthelet pour sa grande gentillesse et disponibilité dont je garderai un chaleureux souvenir ainsi qu'à sa belle-fille Jacinthe pour les photos


Photos Mr Réal Berthelet, Laiteries du Québec

Texte Maeva Milanka


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