Aux origines de l’école Notre-Dame-des-Neiges
- Jonathan Buisson (Cloud Pouarier)
- 16 sept.
- 6 min de lecture

Dans notre quartier, plusieurs bâtiments furent victimes de démolition, sans considération pour leur véritable valeur. Certes, il ne s’agissait pas tous de bâtiments possédant une valeur patrimoniale élevée, mais chacun racontait une histoire, témoin du temps qui passe, et cette valeur se voyait amplifiée par ce simple qualificatif. Certains citoyens les voyaient comme des bâtiments vétustes et sans intérêt, tandis que des spéculateurs y voyaient l’opportunité de développer des espaces pour les plus nantis, avec pour seule considération la valeur monétaire. C’est pour cette raison que chaque bâtiment du quartier répondant à ces critères devrait être pris en considération avant de songer à le faire disparaître.
Parmi les rares bâtiments qu’il reste, l’école Notre-Dame-des-Neiges représente une pièce majeure de ce patrimoine. Par son imposante structure centenaire, elle occupe une place de choix sur le chemin de la Côte-des-Neiges et demeure un élément visuel important du quartier. Nous allons revoir ensemble l’origine des premiers établissements scolaires du quartier, avant la construction de l’école actuelle, et explorer l’histoire du terrain et du bâtiment qui furent érigés à cet endroit.
Occupation avant 1698 Pour cette période, nous possédons peu ou pas d’informations archéologiques. Cependant, nous pouvons affirmer sans doute que cette partie du territoire possédait des atouts majeurs : un terrain plat sur les hauteurs de la montagne. Le secteur du haut de la côte se caractérisait par ses terres formant un vaste plateau, propice à l’érection de maisons. La proximité d’un cours d’eau, le ruisseau Raimbault, ajoutait un élément favorable à cet hypothétique établissement. En 1698, ces terres furent concédées à monsieur Pierre Raimbault, puis en 1699 à Pierre Marheteau. À cette époque, on y retrouvait encore une grande bande de terres communes, traversées en partie par le ruisseau.

L’école se situe aujourd’hui à l’emplacement même de cette ancienne commune. Un moulin banal à eau, construit par les seigneurs, se trouvait là où l’on retrouve aujourd’hui l’annexe sud du bâtiment.
Par la suite, les terres furent vendues à un certain Toussaint Savoyard, qui y construisit une maison en bois, une tannerie et un atelier.

La terre et les bâtiments furent rachetés par la famille Claude, qui reprit le commerce de la tannerie présent sur ces terres, en améliorant les installations. Pierre Claude fils, également tanneur comme son père, fut maire de Côte-des-Neiges pendant 25 ans. Il fit construire une maison en brique sur son terrain. Lorsque l’école vint s’y installer, le terrain fut racheté et la maison de brique fut déménagée au coin des rues Gatineau et Lacombe.

Une autre portion du terrain fut léguée pour permettre le passage d’un chemin, qui fut nommé « rue Claude », à la demande de la famille. Sur la portion nord du terrain, la maison de la famille Doucet fut également détruite pour permettre la construction de l’école. Les prédécesseurs de l’école

Au début du 19e siècle, les enfants de Côte-des-Neiges étaient instruits dans un cadre modeste et rudimentaire. Les garçons et les filles recevaient l’enseignement d’instituteurs laïques, mais dans des maisons privées séparées, situées sur un terrain détaché de la ferme Desmarchais, près du noyau villageois, dans le haut de la côte. Ce même terrain, aujourd’hui occupé par l’église Notre-Dame-des-Neiges, est acquis en 1814 par un prêtre sulpicien.

En 1817, il y fait construire une « chapelle école » destinée à l’éducation des filles. Cette initiative marque le début de l’implication active des institutions religieuses dans l’enseignement à Côte-des Neiges, en particulier pour les jeunes filles issues du milieu populaire.

L’éducation des garçons : la première Académie Saint-Joseph Dès 1848, les garçons de Côte-des-Neiges disposent de leur propre établissement scolaire : l’Académie Saint-Joseph. Située un peu plus bas dans le village, elle se trouvait approximativement à l’emplacement actuel de l’église Saint-Kevin.

L’Académie Saint-Joseph était voisine de la forge du village, et le quotidien des élèves était rythmé par le martèlement régulier du fer, qui résonnait dans tout le secteur. Cette proximité témoignait de la vie animée du cœur villageois, où cohabitaient éducation, artisanat et foi. Pendant plusieurs décennies, cette école a accueilli les garçons du quartier, alors que les filles recevaient un enseignement distinct, assuré à partir de 1863 par les Sœurs Grises. Selon toute vraisemblance, l’Académie Saint-Joseph fut construite en 1848 et probablement démolie dans les années 1930. Comme il était d’usage à l’époque, les différents établissements d’enseignement étaient gérés par des laïcs et des institutions religieuses. Lorsque les infrastructures le permettaient, les garçons et les filles étaient répartis dans des établissements séparés.

Avec l’augmentation de la population, il devint nécessaire de construire une école plus grande pour accueillir les enfants. C’est ainsi que fut décidée la construction de l’école Notre-Dame-des-Neiges. La construction de l’école Notre-Dame-des-Neiges C’est sur les terres de la famille Doucet, à l’endroit même où le ruisseau serpentait jadis, que s’est élevée l’école. L’emplacement avait été judicieusement choisi par Pierre Claude, tanneur de profession, qui avait su tirer parti des eaux abondantes pour y bâtir sa tannerie. En 1918, l’école a vu le jour, sous la direction de l’architecte George Alphonse Monette. Elle accueillait alors filles et garçons sous un même toit, séparés par une cloison centrale.

La cour d’école comportait un mur en son milieu pour éviter les interactions entre garçons et filles. Comme dans plusieurs écoles construites à cette époque, on retrouve encore les inscriptions « Garçons » et « Filles » de chaque côté de la façade, témoignage d’une réalité aujourd’hui presque oubliée.

Déclin, mobilisation et modernisation
Après la destruction du village, plus de 200 familles quittèrent le secteur pour se relocaliser. À l’automne 1972, la démographie du quartier changea, et le faible achalandage de l’école fit planer la menace de sa fermeture. On parla même de démolir le bâtiment.

Fort heureusement, un groupe de parents et de citoyens s’organisa et mit au point plusieurs stratégies afin d’augmenter le taux d’occupation du bâtiment. En offrant toutes sortes de services — programmes d’accueil aux nouveaux immigrants, classes d’orientation, formations pour les diverses communautés du quartier —, ces initiatives eurent un franc succès et permirent de rassembler les multiples communautés de Côte-des-Neiges.
Dates clés 1956 : Centralisation des cours complémentaires de 8e et 9e année dans les écoles secondaires. L’école n’offre plus que le cours élémentaire.
1968-1969 : Départ des religieuses de Sainte-Croix de la résidence (côté sud). Les deux premiers étages sont occupés par la Garderie de la Côte.
1979 : Requête du comité des parents pour la révocation du statut confessionnel de l’école. Elle devient la première école à obtenir ce statut.
Témoin de la volonté de cette communauté d’offrir une éducation de qualité à ses enfants, l’école est devenue un lieu de rencontre et de partage, où des générations d’élèves ont puisé leur savoir et leur inspiration. Et si le temps a effacé certaines traces du passé, l’école demeure un monument de fierté pour notre quartier, symbole de notre engagement à perpétuer la tradition de l’excellence.
Le CPE de la Côte Le bâtiment récemment démoli abritait le CPE de la Côte, une véritable institution du quartier !
Né en 1978 d’une initiative de citoyennes membres de la Coop Village Côte-des-Neiges, ce milieu de garde populaire fut installé dans l’ancienne résidence des religieux de l’école Notre-Dame-des-Neiges. Intégré au réseau des centres de la petite enfance (CPE) en 1997, il a accueilli des milliers de petites frimousses pendant plus de 40 ans, jusqu’à l’été 2020, lorsque la CSSDM a évincé le CPE en évoquant la dangerosité du bâtiment.

Ce dernier a été démoli le 15 mars 2022. L’école Notre-Dame-des-Neiges, située dans Côte-des-Neiges, est actuellement fermée en raison de préoccupations liées à l’état de son bâtiment centenaire.
Depuis la rentrée 2024-2025, les élèves ont été délocalisés : ceux du préscolaire à l’école Simonne-Monet et ceux du primaire à l’école Bedford. Le CSSDM mène actuellement des études pour déterminer l’avenir du bâtiment, mais aucun plan de réhabilitation ni échéancier précis n’a encore été établi. Malgré cette situation, l’équipe éducative demeure mobilisée pour offrir un environnement scolaire stable et accueillant aux élèves.
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Texte Jonathan Buisson
Source
Archéotec (2004). Étude du potentiel archéologique.
Banq Archive Ville de Montreal
SMCDN




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